Je suis Charlie
J’ai été élevée dans une bonne famille. J’utilise le terme bonne famille dans ce qu’il a de plus noble et de plus respectueux. Mes parents, ma famille, étaient et sont des personnes charitables et droites. Il y a bien du y avoir des secrets familiaux que je ne connais pas et des actes moins beaux que d’autres. Nous en avons tous. Mais globalement, alors que mon père est mort depuis maintenant presque 30 ans, les gens me parlant de lui ont encore quelques fois des sanglots dans la voix en me racontant ce qu’il avait fait pour eux. La bonté est un ensemble d’acte simple, de la vie de tous les jours, qui font que la vie ne se cantonne pas à son « petit » monde mais, bien au contraire, est tournée vers les autres.
Ainsi chez moi, la table a toujours été extensible ; les lits , même mal fait, toujours ouverts aux personnes en ayant besoin ; le temps, une chose pouvant être utiliser pour aider l’autre et les objets des biens faits pour être prêter…
Mes parents m’ont appris la bonté.
La vie, elle, m’a inculqué sa valeur. Le manque d’un père, le manque d’une amie, d’un ami… quand les morts ne se comptent plus sur une seule main, presque deux alors que sa vie ne compte pas encore 20 printemps… quand on sait la souffrance de ceux qui restent, quand on sait que la mort d’un proche n’efface pas la mort d’un autre, mais que bien au contraire elle multiplie les pertes premières… Quand on sait la solitude d’une fin de nuit quand l’autre nous manque… sans retour… et quand on mesure l’amour qu’on a pour les autres en imaginant, durant les nuits sans sommeil, la souffrance que l’on ressentirai s’ils venaient à mourir.
Chez moi on ne dit pas partir. Quand on meurt, on meurt.
La mort m’a appris la valeur de la vie.
Enfin, mon enfance m’a appris l’importance de la liberté. Physique d’abord, peut être parce-que ma grande maison blanche de ce pays du bout de monde était ceinte de hauts murs surmontés de tessons de bouteille. Peut-être par souvenir de mon père emprisonné pour je ne sais quelle raison « broutillesque » dans ce pays du bout du monde. En fait je ne sais pas, mais je suis née libre, je vis libre, je suis libre. Et c’est une chance que beaucoup n’ont pas. Je suis aussi libre moralement, peut être parce-que ma famille m’a toujours écoutée même quand je n’étais pas d’accord, peut être car ma liberté d’expression a toujours été respectée. Peut être aussi car n’ayant pas eu la même enfance que beaucoup et donc pas les mêmes expériences et pas la même vision des choses, j’ai souvent du m’essayer à l’exercice du « non je ne suis pas d’accord ».
En fait je n’en sais rien mais je suis libre, je me ressens libre.
Les livres, la photo, les reportages, et mes professeurs de français, d’histoire, d’économie m’ont, eux, appris à regarder, à lire entre le lignes à comprendre les choses. A aller plus loin que ce qui est visible. Et à oser m’exprimer. Et j’ai voulu devenir journaliste. Pour montrer les choses, pour permettre aux gens de savoir, pour que ma chance puisse devenir celle des autres. Je ne le suis jamais devenu… ce métier est difficile, peut être trop difficile pour moi.
Alors aujourd’hui… 30 ans après 1985 et la mort de mon père, 20 ans après 1995 et la mort de David assassiné au Tchad lors de son premier reportage, 10 après 2005 et ma renaissance, aujourd’hui en 2015, pour toutes ces raisons JE SUIS CHARLIE ! Et nous devons tous ÊTRE CHARLIE ! Mais aussi demain, et après demain. Pour toujours se souvenir que rien n’est acquis et que des choses comme la liberté de la presse, la valeur de la vie, la bonté ne sont pas de vains mots…
Quelques liens pour ne pas oublier et montrer votre attachement à cette liberté
La presse satyrique:
Charlie Hebdo
SinéMensuel
Le Canard Enchainé
Le travail de journaliste et de reporter:
Reporter sans Frontière
Liens et vidéos sur la Société
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