Une vie, un vol, un rêve…
Ce matin je suis née et ce soir je mourrais. La vie est belle, sous moi le sol défile, je maîtrise mon corps, ma vie ne va durer que quelques heures, juste le temps de vivre, d’aimer et enfin d’attendre le repos avec plaisir. Le temps n’est rien qu’une dimension, rien de plus qu’une notion que mon cerveau n’assimilera jamais. Rien de plus qu’une vue de l’esprit.
Quelques part loin en dessous de moi défile la terre, mes voltes m’emmènent de plus en plus loin de mon lieu de naissance. Cette douce sensation de l’air défilant sous mes ailes me fait vibrer de bonheur, un vrai plaisir, une joie, ne serais je née que pour cela me suffirait, ne jamais me poser, voler jusqu’à ma mort, vibrer de bonheur jusqu’à en mourir.
Ce soir je me poserais à moins que je ne puisse mourir en vol et ma vie n’aura été que griserie et vitesse, puissance et douceur, le vent m’aura caressé jusqu’à n’en plus pouvoir, mes yeux seront rassasiés de paysage, mes ailes épuisées de battre s’éteindront dans un souffle et je n’aurais qu’à me laisser tomber. Peut être même mourrais-je avant de sentir le sol sous mon corps.
Mais en attendant, je vole et c’est l’instant présent qui compte. Les champs de céréales suivent les champs de mer, l’infini est mon désert, sans limite et c’est ce qui fait sa beauté. Je pourrais être là ou ailleurs cela ne compte pas. Dans un instant déjà je n’y serais plus et le passé ne sera plus qu’un doux rêve.
Le feux de mes reins me rappelle la raison de mon vol, de mon existence. Je n’ai alors de cesse d’accomplir mon destin, de remplir ma fonction première. D’obéir à mon corps qui, battement après battement, me pousse vers cette exigence qui forge une race. Trouver l’autre, trouver celui avec qui je serais un, sans qui je ne resterais qu’un bout de moi même. Juste une partie du monde et non le monde en entier.
Un léger courant me pousse, me tire, m’enveloppe et me porte vers cet autre. L’ivresse de lui est là, entière ! Et je me saoule de lui. Je découvre cette chaleur dans mes reins comme j’avais découvert l’usage de mes ailes, sans même y réfléchir. Ce soir je mourrais, le soleil qui poursuit sa course dans l’horloge du ciel me l’indique. Lentement il décline.
Les courants de brume finissent de m’emporter. La nuit est là. La mort approche et plus elle est imminente et plus la joie de vivre me submerge. Peut on mourir de bonheur ? J’ai encore dans les reins le souvenir de la vie, et dans mon cœur comme une douce tendresse pour un lieu dont je ne me souviens plus, celui de mon aurore. Ce matin je suis née et ce soir je meurs. Mes ailes cessent de battre. Je sais que mon âme ne sera plus avant même que je ne touche le sol, mes ailes se replient. Ma vie si brève est finie, mon éternité commence .
Ecrit en 2007.
Liens et vidéos sur la Société
Extrait du film La Source des Femmes L'hommage de Taubira à Tignous Liens et vidéos sur la Société Rire en chanson de l'actualité Et si le jeu pouvait nous sauver ? Websérie itinérante Le capitalisme ? Vivre...
[jr_instagram id="2"]